Expérimenter un forfait d’équipe
Depuis plusieurs années, une expérimentation sur les nouveaux modes de rémunération (ENMR) a permis à plusieurs centaines d’équipes (en maison, pôle et centre de santé) de recevoir un financement expérimental.
Ce forfait comprenait pour les 1ers sites expérimentateurs un module autour de la coordination de l’équipe, et de manière optionnelle, un module autour des nouveaux services à la personne (essentiellement éducation thérapeutique) et un module sur la délégation de tâches.
L’expérimentation s’est recentrée avec les derniers sites inclus en 2014 sur le premier module (financement du travail de coordination des équipes : temps de réunion, travail sur des protocoles et des projets de santé…).
Le forfait est versé à l’équipe (et non pas à chaque membre individuellement), ce qui a nécessité pour les équipes libérales la création d’une forme sociétaire adaptée à ces rémunérations : la SISA (Société Interprofessionnelle de Soins Ambulatoires).
Des financements des équipes coordonnées de soins primaires ?
Conduites depuis fin avril entre 48 organisations syndicales représentatives des professions médicales, paramédicales et des centres de santé, ainsi que l’UNPS, les négociations devaient permettre le financement de la coordination des soins primaires (et des équipes coordonnées). Après la signature d’un « point d’étape » en juillet 2014, elles ont repris en septembre pour aboutir à un projet d’avenant à l’accord-cadre interprofessionnel (Acip) et un projet d’accord conventionnel interprofessionnel (ACI)
- financer la coordination autour d’un patient (patients chroniques et complexes) – financement direct et forfaitaire des professionnels (médecin généraliste, infirmier, kiné, pharmacien) via des rémunérations individuelles.
Négociations menées entre l’UNCAM et l’UNPS (Union Nationale des Professionnels de Santé).
Voie réglementaire : ACIP (Accord cadre interprofessionnel). Cet accord est applicable aux 12 professions de santé représentées à l’UNPS. Si au moins une organisation syndicale représentative de la profession est signataire, l’accord s’applique à la profession concernée.
- financer des équipes de soins primaires – financement structurel (à une équipe) sur son organisation et sa coordination.
L’objectif est de prendre le relais de l’expérimentation sur les nouveaux modes de rémunération et de soutenir l’émergence de nouvelles équipes (en maisons, pôles et centres de santé).
Négociations entre l’UNCAM et différentes organisations qui en ont accepté le principe en juillet 2014 (parmi les signataires : CSMF, MG France, Uspo, Sniil…).
Voie réglementaire : ACI (accord conventionnel interprofessionnel) – Cet accord conventionnel national donne lieu à des déclinaisons régionales (avec des contrats type qui font l’objet des négociations en cours). Il pourrait par exemple être signé entre une équipe en MSP, l’ARS et la CPAM.
Échec des négociations
Les professionnels ont très majoritairement rejeté ces accords début novembre.
Seule l’Union nationale syndicale des sages-femmes (ONSSF) aurait voté pour le texte. MG France, le Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux (Sniil), l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (Uspo) et l’Organisation nationale des syndicats d’infirmiers libéraux (Onsil) se seraient abstenus. Les autres syndicats (33) auraient voté contre.
Les raisons invoquées pour s’abstenir ou voter contre ont été variées :
- textes et moyens proposés aux professionnels sur le terrain irréalistes et trop complexes ;
- financements ridicules prévus sur la coordination et les soins primaires ;
- hostilité plus fondamentale aux équipes en maisons et pôles de santé ;
- volonté de ne négocier que sur des éléments mono-professionnels (devenir de la médecine libérale notamment et négociations conventionnelles).
Les conséquences de cet échec risquent d’être lourdes pour les acteurs des soins primaires, et en particulier pour les équipes en pôle et maison de santé.
L’impasse de la négociation sur les soins de proximité a par ailleurs eu pour conséquence la suspension des discussions entre l’Assurance Maladie et les centres de santé en vue d’un nouvel accord national.
Un règlement arbitral pour le 18 février 2015
Il s’agit d’une procédure qui permet à l’État de reprendre la main et, à partir de ce qui a été débattu pendant la négociation, de décider ce que sera l’extension des nouveaux modes de rémunération. La ministre, Marisol Touraine, a annoncé qu’elle allait demander l’élaboration d’un tel règlement arbitral sur les soins de proximité suite à l’échec des négociations.
L’arbitre a été désigné mi novembre 2014 par la présidente du Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie. Il s’agit de Bertrand Fragonard, Magistrat à la Cour des comptes. Il a occupé différentes fonctions, dont celles de directeur de la Caisse nationale des allocations familiales (1980-1987), directeur de la Caisse nationale d’Assurance Maladie des travailleurs salariés (1997-1998) et président du Haut Conseil à la famille. Il est aussi l’auteur de « Vive la protection sociale » (Editions Odile Jacob).
Le calendrier : l’arbitre devra d’ici le 18 février 2015 proposer un règlement arbitral permettant de pérenniser la rémunération du travail en équipe en MSP/PSP. Cet arbitrage ne concernera donc que le volet ACI.
Le règlement arbitral, soumis à l’approbation des ministres en charge de la sécurité sociale, est pris pour une durée de cinq ans.
Le Conseil d’Administration de la FémasIF a sollicité l’ARS lors du comité de pilotage du 12 décembre 2014 pour que les équipes dans l’expérimentation puissent avoir l’assurance d’être financées sur le 1er trimestre 2015.
A suivre de très près donc, et c’est ce que fera la FFMPS, puisque c’est bien l’avenir des équipes pluriprofessionnelles de soins primaires qui est en jeu.
À lire également :
- l’édito de la lettre de novembre 2014 de la FémasIF : Chronique d’une mort annoncée ;
- le courrier transmis à l’ARS dans le cadre du comité de pilotage NMR de décembre 2014.